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2018 : analyse des chiffres du réseau Europa Cinemas

Un record dans la continuité

19/05/2019

Nous revenons dans le détail sur les résultats des films européens dans le réseau Europa Cinemas en 2018, qui représentent près de 42 millions d’entrées en cette année record pour les 1 121 cinémas soutenus par Europe Créative/MEDIA. De la place des « biopics » aux bons résultats des films documentaires, quelles tendances pouvons-nous identifier ? Au-delà des statistiques générales, nous consacrons ici des focus aux résultats des films documentaires, des films d’animation et des films polonais.

2018 : analyse des chiffres du réseau Europa Cinemas

Communiqué de presse (en anglais)

Un record pour les salles du réseau Europa Cinemas / MEDIA

Les séances et entrées des films européens n’ont jamais été aussi hautes dans le réseau. Bien sûr, la croissance de ce dernier en termes de nouvelles salles membres explique en partie ce résultat. Le réseau recrute toujours bien plus de salles, chaque année, qu’il n’en perd en raison de fermetures. Mais l’année 2017 avait tout de même été une année de forte baisse des entrées des films européens et de relative stagnation de leur nombre de séances dans le réseau. A cette exception près, elles sont en forte hausse depuis 2014 et Europa Cinemas occupe donc une place grandissante sur le marché européen, qui va de pair avec son rôle pour la diffusion du cinéma européen.

L’effort de programmation des salles se poursuit dans la continuité

Les salles consacrent ainsi toujours près de 6 de leurs séances sur 10 au cinéma européen (58,2% en 2018) et plus précisément 34,5% de leurs séances au cinéma européen non national. Pour mesurer cet effort par rapport au marché, notons que l’Observatoire européen de l’audiovisuel estime à 29,4% les entrées des films européens dans les salles de cinéma européennes. Les salles Europa Cinemas sont à 55,3%, soit 25.9 points de plus : l’effort de programmation des salles Europa Cinemas par rapport au marché, pour la diffusion du cinéma européen, correspond donc à un quart de leur activité.

Ces chiffres généraux masquent cependant des situations contrastées

Certains marchés ont connu selon l’Observatoire de fortes baisses (Allemagne, Autriche, Italie, Finlande, Slovaquie), des baisses plus mesurées (France, Belgique, Suède) ou de fortes hausses (République tchèque, Danemark, Royaume-Uni, Pologne, Slovénie). Cependant, ces tendances sont comme « lissées » dans les salles Europa Cinemas voire contredites par ces dernières. La baisse est ainsi beaucoup moins forte dans les salles allemandes et autrichiennes du réseau. Les entrées de nos salles italiennes et françaises sont même en hausse. Ce constat positif vaut pour tous les pays où Europa Cinemas est présent, à quelques exceptions près comme la Croatie et la Hongrie. Ce phénomène de « lissage » avait déjà été analysé en France suite à un été 2018 particulièrement mauvais pour les films grand public (sous-entendu, « américains »), été de la Coupe du Monde qui avait été l’occasion de noter que les salles art et essai ne connaissaient pas, de leur côté, de fortes variations de leurs entrées. Que ce soit en France ou sur le marché européen, au-delà des résultats particuliers des films européens, les salles art et essai et notamment Europa Cinemas enregistrent donc d’année en année des résultats généraux plutôt stables, en dépit de la concurrence. Un motif de satisfaction à mettre sur le compte des efforts de modernisation ou actions entreprises en matière d’animations et de communication.

De fortes cinématographies nationales

Malgré ces contrastes entre les pays, une tendance à l’affirmation des cinémas nationaux peut être relevée en 2018. C’est notoirement le cas des marchés polonais, danois, anglais et italiens. Or cette tendance n’est pas vérifiée dans le détail des situations des salles Europa Cinemas, la tendance pouvant être contredite dans un sens comme dans l’autre. Cette observation vient appuyer l’idée que les salles du réseau sont moins soumises aux aléas de l’offre que celles des chaînes. 

Une vraie diversité de films européens

De façon notable, ces résultats satisfaisants sont à mettre sur le compte de la diffusion en profondeur d’une vraie diversité de films européens, qui représentent davantage de nationalités que les années précédentes. Ainsi, deux films européens ont réalisé plus de 900 000 entrées : le polonais Cold War (975 000) et l’anglais Darkest Hour (921 000). Trois autres films se situent au-dessus des 500 000 entrées : le dernier film de Luca Guadagnino pour l’Italie, Call Me By Your Name (846 000), dont on peut relever la notoriété chez les jeunes participants aux 28 Times Cinema, Everybody knows (616 000) pour l’Espagne et l’anglais The Children Act (578 000). 9 nationalités sont présentes dans notre top 20 européen. C’est une diversité remarquable avec une forte présence de films polonais, italiens et allemands à ce niveau et une relative faiblesse des films français cette année.

De bons résultats pour les biopics et figures de la culture européenne

En termes de thématiques, nous avons pu relever cette année une forte présence, que ce soit à l’échelle européenne ou au niveau des marchés nationaux, de films, réels biopics ou non, consacrés à des personnalités historiques ou culturelles de notre continent. Il en est ainsi de Darkest Hour, de Loving Vincent, de The Death of Stalin sur un ton humoristique, des documentaires Papst Franziskus et Maria by Callas, de 3 Jours à Quiberon, du biopic allemand Gundermann, très récompensé aux récents Lolas, de Unga Astrid, consacré à la créatrice de Fifi Brindacier et qui circule bien en Europe en ce début d’année 2019, ou bien encore de La Douleur, adaptation de Marguerite Duras. Soit près d’un film européen sur cinq dans notre top 50. Cette tendance est appuyée par des films dont le succès est resté plutôt cantonné à leur marché d’origine, notamment Waldheims Walzer en Autriche, Jan Palach en République tchèque, Loro 1 et 2 en Italie.

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Documentaires : succès en profondeur

Les films documentaires occupent une place privilégiée dans les salles Europa Cinemas avec 5% de leurs entrées et plus précisément 8% de leurs entrées européennes en 2018, des chiffres très élevés par rapport au marché. Cette présence est plus forte depuis la généralisation de la projection numérique, qui permet une plus grande souplesse et donc de programmer davantage de films sur des séances ciblées, événementielles.

Comme chaque année, les succès « nationaux » sont nombreux, qui restent parfois cantonnés à leur pays d’origine. Citons à nouveau Waldheims Walzer (Ruth Beckermann) en Autriche, 1968 (Tassos Boulmetis) en Grèce, The Camino Voyage (Donal O'Ceilleachair) en Irlande ou encore De Wilde Stad (Mark Verkerk) aux Pays-Bas.

Mais certains documentaires circulent d’un pays à l’autre et 2018 est une année forte en la matière, avec deux films au-dessus des 200 000 entrées dans notre réseau. Papst Franziskus - Ein Mann seines Wortes, que Wim Wenders a consacré au Pape actuel, attire près de 230 000 spectateurs dans les salles d’une dizaine de pays, notamment en Allemagne (150 000 entrées dans les cinémas du réseau). Wim Wenders aura d’ailleurs connu les plus gros succès de la deuxième partie de sa carrière avec des documentaires, celui-ci s’ajoutant à ceux de Buena Vista Social Club, The Salt of the Earth et Pina. Quant à Maria by Callas (Tom Volf), ses 220 000 entrées se répartissent dans les salles d’une vingtaine de pays, notamment en Espagne, où Europa Cinemas représente 75% de ses 67 000 entrées.

Derrière eux, trois films réalisent entre 100 000 et 200 000 entrées : Visages Villages (Agnès Varda et JR) qui atteint presque les 300 000 entrées en deux ans dans le réseau, Ni juge, ni soumise (Yves Hinant, Jean Libon, 164 000 entrées), qui a essentiellement tourné en France, en Belgique et aux Pays-Bas et McQueen (Ian Bonhôte, Peter Ettedgui) avec 100 000 entrées dans une dizaine de pays.

Visages Villages et Maria by Callas sont de bons exemples d’une diffusion dans la durée, la carrière en salle de ces deux films s’étendant sur deux années. Diffusion sur la durée rime d’ailleurs avec diffusion en profondeur, puisque Maria by Callas est passé cette année dans 524 salles du réseau, soit presque la moitié de celui-ci ! Visages Villages n’est pas loin, avec 488 salles en 2018 et 669 sur deux ans.

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La bonne circulation des films d'animation

Nous constatons depuis plusieurs années que les films d’animation ont tendance à très bien circuler en Europe et à faire une grande partie de leurs films sur le long terme. Nous notons que les 2 films d'animation qui ont fait le plus d'entrées dans notre réseau en 2017 sont toujours présents en 2018 dans les 4 meilleurs résultats pour les films d'animation. Loving Vincent, qui a fait près de 450 000 entrées en 2017, a plus que doublé le nombre total d'entrées dans le réseau, avec 468 000 entrées en 2018. Paddington 2 a également poursuivi sa brillante carrière, avec 156 000 entrées en 2018 qui s'ajoutent à ses 263 000 entrées en 2017. Parmi les sorties récentes, nous pouvons souligner les résultats des 2 autres films complétant le «Top 4» des films d'animation : Early Man (223 000 entrées) et Dilili à Paris (181 000).

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Vivacité du cinéma polonais

Nous avions mis en valeur la qualité de la production polonaise à l’occasion de la Conférence Europa Cinemas de Varsovie, en 2009. Dix ans plus tard, nous pouvons renouveler notre constat et louer ces films polonais qui représentent la quatrième nationalité, en termes d’entrées, dans notre top annuel.

Pawel Pawlikowski en est bien sûr le chef de file qui, en deux films polonais après un début de carrière en Angleterre, s’impose comme l’un des principaux réalisateurs européens, désormais reconnu du public des salles art et essai. Avec près d’un million d’entrées dans le réseau, Cold War est un succès dans les 25 pays européens où il est sorti. Les salles du réseau sont particulièrement responsables de ces résultats en Italie (87% de ses 90 000 entrées), aux Pays-Bas (81% de 92 000), en Espagne (133 000 entrées dans le réseau, soit 63%) et en France (plus de la moitié de ses 316 000 entrées).

Revenons-y encore: en deux ans d’exploitation, le film (et documentaire) d’animation Loving Vincent (Dorota Kobiela, Hugh Welchman) poursuit sa route et cumule 925 000 entrées dans le réseau. Il a notamment très bien fonctionné en Autriche et en Allemagne, en République tchèque et en Slovaquie, aux Pays-Bas et en Roumanie, où les salles du réseau représentent la quasi-totalité de ses 16 000 entrées, un très bon score pour le pays.

Foxtrot (Samuel Maoz) ou encore Another Day of Life (Raúl de la Fuente, Damian Nenow) sont d’autres exemples de coproductions polonaises qui ont circulé dans les salles du réseau tandis que Fuga, deuxième film de la jeune réalisatrice Agnieszka Smoczynska, sorti en fin d’année en Pologne après une tournée triomphale dans les festivals débutée à la Semaine de la Critique 2018, a commencé à tourner dans les salles européennes en ce début d’année 2019.

Du côté des salles polonaises, l’année 2018 est également une grande année pour le cinéma national. Ainsi de Kler, l’un des plus grands succès du cinéma polonais, avec plus de 5 millions d’entrées dans son pays et 155 000 au Royaume-Uni. Ce film qui aborde la question de la pédophilie des prêtres a rencontré un succès massif, également dans les 40 salles polonaises du réseau, qui l’ont toutes programmé. Le film a réuni plus de 20 000 spectateurs dans 2 salles du réseau et plus de 10 000 dans 9 salles ! 

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La place des réalisatrices dans le réseau

La perte de l'inestimable Agnès Varda début 2019 nous incite à examiner la place des films réalisés par des femmes dans notre réseau.

En 2018, notons que parmi les 50 meilleurs films européens dans les salles du réseau (en séances), 11 ont été réalisés par des femmes, soit un peu plus de 20%. Certains de ces films ont eu beaucoup de succès: The Bookshop, réalisé par Isabel Coixet (232 000 entrées), 3 Jours à Quiberon (210 000) réalisé par Emily Atef et Loving Vincent (468 000), co-réalisé par Dorota Kobiela et Hugh Welchman. Visages Villages, d’Agnès Varda et JR, a poursuivi sa carrière exceptionnelle et figurait toujours, fin 2018, à la 39e position des films européens avec 890 projections et 148 000 entrées au cours de l’année.

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L'importance des films cannois

Année après année, les films présentés au Festival de Cannes occupent une place particulière dans le réseau Europa Cinemas. En 2018, Cold War a donc obtenu le meilleur résultat du réseau (entrées), Everybody Knows est 4e et In the Fade, présenté en 2017, est 9ème.

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Les chiffres présentés ici sont donc ceux de l’année 2018. En 2018, Europa Cinemas était présent dans 674 villes des pays européens membres du Programme Europe Créative / MEDIA, soit 46 villes de plus qu’en 2017. Le réseau comptait 1 121 cinémas, soit 71 de plus qu’en 2017, et 411 de plus qu’en 2009. Ces 1 121 cinémas représentaient 2 709 écrans, dont 45% sont des mono-écrans et 43% comptent de 2 à 4 écrans. Le réseau comptait 31 multiplexes en 2018 (8 écrans et plus).

Communiqué de presse (en anglais)

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Jean-Baptiste Selliez, avec Maxence Delamare et Charlotte Wiensierski, mai 2019

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